Publié le 12 janvier 2022
Le jeu vidéo et ses détracteurs : quelques préjugés et clichés sur les consommateurs et leurs excès
Si les mentalités évoluent, le domaine du jeu vidéo véhicule toujours des inquiétudes, des préjugés et des clichés qui sont tenaces. Il conserve une connotation négative à bien des égards pour le grand public, pour partie par méconnaissance et ignorance mais aussi avec une part de vérité. Les dérives sont faciles. Citons par exemple les dangers d’une consommation excessive, et ses corollaires : le manque de soins corporels et psychiques que s’infligent les joueurs happés par le temps de jeu, la désocialisation, les addictions non seulement au jeu mais encore à certaines substances destinées à stimuler les facultés, la triche dans le jeu par l’intermédiaire de logiciels spéciaux, le trucage de résultats pour l’appât du gain et les paris esportifs. Les non-initiés imaginent encore probablement le joueur (ou « gamer ») comme un adolescent asocial, potentiellement violent, sédentaire, cloitré dans sa chambre, les yeux rivés des heures durant devant son écran d’ordinateur, et s’alimentant de « junk food ».
Mais aujourd’hui, lorsque le jeu vidéo et l’esport sont encore diabolisés, c’est uniquement par ignorance. Un pont générationnel reste à créer car toutes les générations ne sont pas encore imprégnées de la culture geek.
Il convient de relever ici les propos horrifiés de la première dame de France, Brigitte Macron, cités par le quotidien Le Monde, laquelle à l’occasion d’une visite à La Maison des adolescents du Loir-et-Cher le 3 février 2021 aurait dit « Fortnite, c’est terrible… Quand ils sont sur des jeux comme ça, comment faire pour qu’ils arrêtent ? »[1]
Face à cette méconnaissance de l’univers du gaming, les chiffres (qui parlent d’eux-mêmes : la finale des Worlds 2021 de League of Legends a révélé un pic d’audience à plus de 73 millions de spectateurs en novembre 2021) comme la découverte de la discipline révèlent une autre réalité. Désormais dans la catégorie grand public, les joueurs se répartissent dans toutes les tranches d’âge, avec une moitié chez les 15-39 ans et une quasi-égalité hommes-femmes[2]. Les meilleurs joueurs tels des sportifs de haut niveau prennent le plus grand soin de leur corps pour être au mieux de leur forme au moment des grands rendez-vous de compétitions et parmi ceux-là, certains, souvent encore très jeunes, sortent du lot, ont le bonheur de vivre de leur passion et d’intégrer des équipes professionnelles.
Certes, il ne faut pas occulter l’impuissance de certains parents qui « ne parviennent plus à domestiquer l’usage des jeux par leurs enfants dès qu’ils abordent l’adolescence et qu’ils possèdent leur smartphone »[3] ; on peut compter sur l’interventionnisme étatique pour encadrer la pratique des mineurs, mais la solution passe avant tout par l’éducation, – à l’instar du harcèlement – afin de sensibiliser la jeune génération et lui apprendre comment se comporter face aux excès et dérives du jeu vidéo.
Ce qui est certain c’est qu’il faut absolument éviter de tomber dans les extrêmes du gouvernement chinois qui, le 31 août 2021 a pris la décision radicale d’interdire le jeu vidéo en ligne aux moins de 18 ans dans la semaine et d’en limiter l’usage à trois heures le week-end[4].
Les parents doivent s’impliquer et fixer les règles pour la pratique par leur enfant à la maison du jeu vidéo. L’éducation des nouvelles générations est de toute évidence nécessaire pour concilier les intérêts des joueurs et les accompagner dans leur passion. Il y a en la matière du pain sur la planche….
Cette étude est extraite du mémoire intitulé « Structuration de l’esport : d’un modèle sportif vers un modèle sui generis » Master 2 droit du Sport Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne 2021 Auteur France Roche.
[1] Le Monde 20/03/2021 Parentologie : le jeu vidéo, néfaste et indésirable ? (lemonde.fr) par Santolaria Nicolas
[2] Barème France Esport – résultats de l’édition 2020
[3].Le Monde 06/09/2021 Interdiction des jeux vidéo en ligne pour les mineurs : « La décision de l’Etat chinois pourrait marquer un tournant » (lemonde.fr) Escande Ph
[4] idem
[5] Le Monde 20/03/2021 Parentologie : le jeu vidéo, néfaste et indésirable ? (lemonde.fr) par Santolaria Nicolas voir bibliographie